Le prisonnier kurde iranien Heidar Ghorbani risque d’être exécuté très prochainement pour «rébellion armée contre l'État» (baghi), malgré de graves violations des normes relatives à l’équité des procès et alors que le tribunal a confirmé qu’il n’avait jamais été armé. En août 2021, la Cour suprême a rejeté sa deuxième demande de révision judiciaire. Sa condamnation repose sur des «aveux» entachés par la torture, qui lui ont été soustraits alors qu’il était soumis à une disparition forcée. PASSEZ À L’ACTION : ENVOYEZ UN APPEL EN UTILISANT VOS PROPRES MOTS OU EN VOUS INSPIRANT DU MODÈLE DE LETTRE CI-DESSOUS Responsable du pouvoir judiciaire Gholamhossein Mohseni Ejei c/o Permanent Mission of Iran to the UN Chemin du Petit-Saconnex 28 1209 Genève Monsieur Mohseni Ejei, Heidar Ghorbani, membre de la minorité kurde d’Iran détenu à la prison de Sanandaj, dans la province du Kurdistan, risque d’être exécuté très prochainement. Au début d’août 2021, la Cour suprême a rejeté sa demande de révision judiciaire, déposée conformément à l’article 477 du Code de procédure pénale iranien. Peu de temps après, les autorités judiciaires ont informé ses proches que son dossier avait été transféré au bureau d’application des peines, ce qui laisse craindre que son exécution ne soit programmée d’un moment à l’autre. Il a déposé une autre demande de révision judiciaire au titre de l’article 477, qui est encore en attente d’examen. Le 21 janvier 2020, à l’issue d’un procès manifestement inéquitable, le tribunal révolutionnaire de Sanandaj a déclaré Heidar Ghorbani coupable de «rébellion armée contre l’État» (baghi) et l’a condamné à mort dans l’affaire du meurtre de trois hommes qui auraient été affiliés aux forces paramilitaires du Bassidj, tués en septembre et octobre 2016 par des personnes liées au Parti démocratique du Kurdistan d’Iran. Dans son arrêt, la Cour suprême reconnaît que Heidar Ghorbani n’a jamais été armé, mais se fonde sur ses prétendus «aveux», qui ont été selon lui obtenus au moyen d’actes de torture et d’autres mauvais traitements. D’après lui, il a dû «avouer» avoir aidé les auteurs des homicides commis, notamment en les transportant en voiture jusqu’aux lieux des faits et depuis ceux-ci. En août 2020, la 27e chambre de la Cour suprême iranienne a confirmé sa condamnation à mort, sans tenir compte des nombreuses violations de la procédure et irrégularités en matière de preuve. Le mois suivant, la Cour suprême a rejeté sa première demande de révision judiciaire. Amnistie internationale a constaté que le verdict rendu violait à la fois les obligations de l’Iran au titre du droit international, qui limite l’utilisation de la peine de mort aux «crimes les plus graves» comprenant un homicide volontaire, et la législation iranienne elle-même, qui prévoit que le crime de «rébellion armée contre l'État» ne peut être établi que si la personne mise en cause est membre d’un groupe armé et si elle a utilisé personnellement des armes. À la suite de son arrestation par des agents du ministère du Renseignement le 11 octobre 2016, Heidar Ghorbani a été détenu à l’isolement de façon prolongée et soumis à une disparition forcée. Il a dit qu’au cours de cette période, il a été torturé de façon répétée afin qu’il fasse des «aveux» enregistrés sur support vidéo qui ont été diffusés sur la chaîne publique iranienne Press TV avant son procès (qui s’est tenu en mars 2017), en violation du droit à la présomption d’innocence. Il n’a pas pu consulter d’avocat pendant la phase d’instruction, et ses avocats n’ont pas eu accès à la totalité du dossier au moment du procès. Je vous appelle à empêcher immédiatement l’exécution de Heidar Ghorbani. Je vous prie également d’annuler sa déclaration de culpabilité et sa condamnation à mort et de lui accorder un nouveau procès équitable, sans recours à la peine capitale et dans lequel les «aveux» obtenus au moyen d’actes de torture et d’autres mauvais traitements ou hors de la présence d’un avocat ne peuvent pas être retenus comme élément à charge. Enfin, je vous engage à veiller à ce que toutes les allégations de disparition forcée et de torture fassent l’objet d’une enquête, afin les responsables présumés soient traduits en justice et jugés équitablement. Veuillez agréer, Monsieur Mohseni Ejei, l’expression de ma haute considération. COMPLÉMENT D'INFORMATION Le 12 septembre 2020, les avocats de Heidar Ghorbani ont demandé au responsable du pouvoir judiciaire d’exercer les pouvoirs que lui confère l’article 477 du Code de procédure pénale afin d’ordonner une révision de cette affaire au motif que le verdict rendu était manifestement contraire aux dispositions du droit iranien et de la charia. Ils ont indiqué que le responsable du pouvoir judiciaire avait renvoyé la demande de révision judiciaire devant une chambre de la Cour suprême, qui l’a rejetée au début d’août 2021. L’article 287 du Code pénal islamique dispose: «Tout groupe prenant les armes contre les fondements de la République islamique d’Iran est considéré comme baghi et, s’ils venaient à recourir aux armes, ses membres seraient alors condamnés à mort.» Selon les informations enregistrées dans le dossier de Heidar Ghorbani et obtenues par Amnesty International, le juge d’instruction dans cette affaire, qui travaille pour le parquet de la province du Kurdistan, a déclaré par écrit le 1er février 2017 qu’il n’existait aucun élément permettant d’inculper Heidar Ghorbani de «rébellion armée contre l'État» (baghi). Cependant, le procureur a insisté pour que ce chef d’accusation soit inclus dans l’acte d’accusation. Heidar Ghorbani a nié avoir été membre du Parti démocratique du Kurdistan d’Iran, un groupe armé d’opposition. Heidar Ghorbani a été arrêté le 12 octobre 2016 par une dizaine d’agents du ministère du Renseignement qui ont effectué une descente chez lui et n’ont pas présenté de mandat d’arrêt. Pendant presque trois mois, sa famille n’a obtenu aucune information sur ce qui lui était arrivé et le lieu où il se trouvait, ignorant même s’il était mort ou toujours en vie. Le 5 janvier 2017, il a été autorisé à appeler brièvement sa famille, mais son lieu de détention a continué d’être tenu secret. Après cet appel téléphonique, sa famille a continué d’ignorer ce qu’il était advenu de lui et le lieu où il se trouvait jusqu’en avril 2017, lorsqu’il a été transféré à la prison centrale de Sanandaj. Après ce transfert, Heidar Ghorbani a révélé que, pendant sa disparition forcée, il avait été détenu pendant plusieurs jours dans un centre de détention à Kamyaran, dans la province du Kurdistan, tenu par l’Unité d’enquête de la police iranienne (Agahi), puis transféré dans un centre de détention du ministère du Renseignement à Sanandaj, où il a été maintenu en détention à l’isolement, en violation de l’interdiction absolue de la torture et des autres mauvais traitements, pendant plusieurs mois. Il a affirmé que les agents qui l’ont interrogé durant cette période l’avaient frappé à coups de pied et de poing, privé de sommeil et forcé à s’allonger sur le sol pendant qu’ils lui piétinaient la poitrine, ce qui lui donnait l’impression d’étouffer. Le 8 mars 2017, Press TV, une chaîne publique iranienne qui diffuse des émissions en anglais, a diffusé une vidéo de propagande intitulée «The Driver of Death» («Le conducteur de la mort»), présentant les «aveux» forcés de Heidar Ghorbani, sans qu’il le sache. Les autorités ont violé non seulement le droit à la présomption d’innocence et le droit de garder le silence pendant les interrogatoires et le procès, mais aussi l’interdiction absolue de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants énoncée par le droit international, en raison de l’angoisse dans laquelle vivent les détenus et leur famille à cause de telles vidéos d’«aveux» qui déshumanisent et diabolisent les victimes, et qui prétendent démontrer leur «culpabilité» pour des faits graves. Outre son procès devant le tribunal révolutionnaire, Heidar Ghorbani a également été jugé devant la première chambre du premier tribunal pénal de la province du Kurdistan pour complicité de meurtre, tentative d’enlèvement et pour avoir aidé les auteurs directs à prendre la fuite. À l’issue de ce procès, il a été condamné le 6 octobre 2019 à un total de 118 années et six mois d’emprisonnement ainsi qu’à 200 coups de fouet. Aux termes du droit international relatif aux droits humains, étant donné le caractère irréversible de la peine capitale, les procédures dans les affaires où elle peut être prononcée doivent être rigoureusement conformes aux normes garantissant le droit à un procès équitable. Toute personne qui encourt la peine de mort doit bénéficier des services d’un avocat compétent à tous les stades de la procédure. Elle doit être présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie sur la base d’éléments sans équivoque et convaincants ne laissant aucune place à une autre interprétation des faits, conformément aux normes les plus strictes en matière de collecte et d’évaluation des preuves. De plus, toutes les circonstances atténuantes doivent être prises en compte. La procédure doit garantir le droit à un réexamen devant une juridiction supérieure aussi bien des éléments factuels que des aspects juridiques de l’affaire. L’application de la peine de mort à l’issue d’une procédure qui contrevient gravement aux normes d’équité des procès constitue une privation arbitraire du droit à la vie, voire une exécution extrajudiciaire. Dans une déclaration datée du 3 septembre 2021, plusieurs experts des droits humains des Nations unies ont conclu: «De nombreuses violations des garanties fondamentales d’équité des procès et de respect de la procédure légale inscrites dans le droit international relatif aux droits humains apparaissent dans le cas de Heidar Ghorbani.» Amnistie internationale s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances, quelles que soient la nature du crime commis, les caractéristiques de son auteur et la méthode d’exécution utilisée par l’État. La peine de mort est une violation du droit à la vie et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. Amnesty International ne cesse d’appeler tous les pays où ce châtiment est encore en vigueur, y compris l’Iran, à instaurer un moratoire officiel sur les exécutions, en vue de l’abolition totale de la peine de mort. LANGUE(S) À PRIVILÉGIER POUR LA RÉDACTION DE VOS APPELS : persan ou anglais Vous pouvez également écrire dans votre propre langue. MERCI D’AGIR DANS LES PLUS BREFS DÉLAIS ET AVANT LE : 1 novembre 2021 Au-delà de cette date, vérifiez auprès de votre section s’il faut encore intervenir.
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Les autorités égyptiennes n’ont pas amené un seul membre des forces de sécurité à rendre des comptes pour le massacre d’au moins 900 personnes lors de la dispersion violente des sit-ins organisés places Rabaa al Adawiya et al Nahda. Douze hommes risquent d’être exécutés de manière imminente et des centaines d’autres purgent de lourdes peines de prison en raison de leur participation aux manifestations, ce qui illustre les priorités biaisées du soi-disant système judiciaire égyptien. En juin 2021, la plus haute cour d’appel d’Égypte, la Cour de cassation, a confirmé les condamnations à mort prononcées contre les 12 hommes, dont de hauts responsables du mouvement des Frères musulmans, déclarés coupables à l’issue d’un procès collectif inique impliquant 739 personnes en 2018, dans le cadre de l’affaire dite « de la dispersion de Rabaa ». Leur exécution peut avoir lieu à tout moment, sans avertissement, car le président Abdel Fattah al Sissi a ratifié leurs sentences capitales définitives. « Depuis huit ans, il apparaît de plus en plus clairement que les autorités égyptiennes souhaitent soustraire les forces de sécurité à toute obligation de rendre des comptes pour leur rôle dans le massacre de Rabaa. Elles préfèrent exercer leur vengeance sur les victimes, les familles des victimes et toute personne qui ose critiquer la difficile situation des droits humains dans l’Égypte d’aujourd’hui, a déclaré Lynn Maalouf, directrice adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnistie internationale. « Les 12 hommes qui risquent d’être exécutés sont détenus dans des conditions cruelles et inhumaines, attendant leur mort, condamnés à l’issue d’un procès collectif manifestement inique et motivé par des considérations politiques. Nous engageons les autorités égyptiennes à annuler ces déclarations de culpabilité et ces condamnations à mort injustes. Elles doivent aussi prendre des mesures attendues de longue date pour traduire en justice les responsables présumés du massacre de Rabaa. « Si cette impunité perdure, l’Égypte sera à jamais hantée par les terribles événements de cette journée. Au regard du climat général d’impunité, la communauté internationale doit aussi soutenir les efforts visant à instaurer un mécanisme de suivi de la situation des droits humains en Égypte au Conseil des droits de l’homme des Nations unies. » Depuis leur arrestation entre 2013 et 2015, ces hommes sont détenus dans des conditions déplorables qui bafouent l’interdiction absolue de la torture et des mauvais traitements, et sont délibérément privés d’accès à des soins de santé adéquats. Certains n’ont pas été autorisés à recevoir des visites de leur famille pendant plus de cinq ans. Parmi les prisonniers qui risquent d’être exécutés figure Mohamed el Beltagy, ancien parlementaire et leader du mouvement des Frères musulmans, détenu à l’isolement dans la tristement célèbre prison du Scorpion, au Caire, depuis qu’il a été arrêté en août 2013. Sa famille n’a pas été autorisée à lui rendre visite depuis 2016. Les autorités carcérales ont refusé que ses proches lui donnent une photo de sa fille Asmaa, âgée de 17 ans lorsqu’elle a été tuée au cours de la dispersion de la place Rabaa al Adawiya. Les frères Mohamed et Mostafa Abdelhai Hussein al Faramawy partagent une petite cellule sombre et mal aérée, dépourvue de toilette, à la prison de Wadi el Natroun. Ils ont été arrêtés le 15 juillet 2013, un mois avant que les manifestants ne soient dispersés place Rabaa al Adawiya, et ont pourtant été condamnés à mort en raison de leur implication présumée. Les autorités égyptiennes n’annoncent pas les exécutions prévues à l’avance, n’informent pas les familles et n’accordent pas de droits de visite d’adieu, en violation de la loi égyptienne, ce qui fait craindre que les exécutions n’aient lieu de manière imminente. Récemment, on a constaté une hausse alarmante du nombre d’exécutions recensées en Égypte – en 2020, le nombre d’exécutions a triplé comparé aux années précédentes. La vague d’exécutions s’est poursuivie en 2021, au moins 81 exécutions ayant été enregistrées depuis le début de l’année. « Les autorités égyptiennes doivent mettre fin à cette utilisation impitoyable de la peine de mort contre des opposants politiques dans le but d’instiller la peur et de consolider leur mainmise sur le pouvoir. La communauté internationale doit intensifier sa pression publique afin de demander au président Abdel Fattah al Sissi de commuer ces condamnations à mort et de sauver la vie de ces hommes », a déclaré Lynn Maalouf. Amnistie internationale s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances, sans exception, quelles que soient la nature du crime commis, les caractéristiques de son auteur et la méthode d’exécution utilisée par l’État. La peine de mort est une violation du droit à la vie et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. Complément d’information Ces 12 hommes ont été déclarés coupables de participation à des manifestations illégales, de l’homicide de sept membres des forces de sécurité et de 10 autres personnes, de tentative de meurtre et d’autres chefs d’accusation en lien avec leur participation au sit-in sur la place Rabaa al Adawiya, ainsi que lors d’autres manifestations et affrontements entre partisans et opposants de l’ancien président Mohamed Morsi, événements qui ont eu lieu entre le 21 juin et le 14 août 2013. Tous les accusés ont été déclarés coupables de toutes les charges retenues contre eux, sans établir de responsabilité pénale individuelle. La procédure a été entachée de violations des droits constitutifs du droit à un procès équitable, notamment du droit à une défense adéquate, du droit de ne pas témoigner contre soi-même, du droit d’être jugé par un tribunal compétent, impartial et indépendant, du droit de citer et d’interroger des témoins et du droit à un véritable réexamen. En outre, les tribunaux n’ont pas ordonné d’enquête sur les allégations de certains accusés qui affirment avoir été victimes de disparitions forcées et d’actes de torture après leur arrestation. Depuis la destitution de Mohamed Morsi en 2013, les autorités égyptiennes se livrent à une répression acharnée contre toutes les formes de dissidence. Elles ont arrêté des dizaines de milliers de détracteurs et d’opposants avérés ou présumés. Des milliers de personnes sont maintenues en détention arbitraire uniquement parce qu’elles ont exercé des droits garantis par le droit international, notamment les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique, ou sur la base de procès manifestement iniques, notamment des procès collectifs ou militaires. Des dizaines de personnes ont été exécutées à l’issue de procès manifestement iniques. ![]() Les autorités iraniennes ont exécuté en secret un jeune homme qui était mineur au moment de son arrestation et avait passé près d’une décennie dans le quartier des condamnés à mort. Sajad Sanjari a été pendu à la prison de Dizelabad, dans la province de Kermanshah à l’aube du 2 août. Sa famille n’en a été informée que lorsqu’un responsable de la prison leur a demandé de venir récupérer son corps plus tard dans la journée. En août 2010, la police a interpellé Sajad Sanjari, alors âgé de 15 ans, dans le cadre de l’affaire d’un homme mortellement poignardé. Sajad Sanjari a déclaré que cet homme avait tenté de le violer et qu’il avait agi en état de légitime défense. En 2012, il a pourtant été déclaré coupable de meurtre et condamné à mort. « En exécutant Sajad Sanjari en secret, les autorités iraniennes font une nouvelle fois la preuve de la cruauté de leur système de justice pour mineurs. Le recours à la peine de mort contre des personnes âgées de moins de 18 ans au moment des faits est totalement prohibé au titre du droit international et constitue une atteinte cruelle aux droits de l’enfant, a déclaré Diana Eltahawy, directrice adjointe pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnistie internationale. « Le fait que Sajad Sanjari ait été exécuté en secret, le privant et privant sa famille de la possibilité de se dire adieu, s’inscrit dans le cadre de la pratique alarmante à laquelle se livrent les autorités iraniennes en procédant à des exécutions en secret ou sans préavis, neutralisant ainsi toute possibilité d’intervention publique ou privée pour sauver la vie des condamnés. Nous leur demandons de mettre fin sans plus attendre à ces violations du droit à la vie et des droits des mineurs en modifiant le Code pénal, afin d’interdire le recours à la peine de mort contre toute personne âgée de moins de 18 ans au moment du crime. » Sajad Sanjari a été reconnu coupable et condamné à mort une première fois en janvier 2012. Lors de son procès, il a admis avoir poignardé l’homme, mais a affirmé qu’il s’agissait d’un cas de légitime défense car celui-ci avait tenté de le violer. Il a ajouté que cet homme avait menacé de l’agresser la veille, et qu’il avait donc emporté un couteau de cuisine pour le faire fuir. Le tribunal a rejeté ses allégations de légitime défense après avoir entendu plusieurs témoins attester de la moralité du défunt. Le tribunal a ajouté que Sajad Sanjari ne pouvait pas faire valoir la légitime défense puisqu’il avait été averti à l’avance et avait donc amplement le temps de porter le problème à la connaissance des autorités ou de demander l’aide des habitants de son village. Sa déclaration de culpabilité et sa condamnation à mort ont tout d’abord été rejetées par la Cour suprême en décembre 2012, en raison des irrégularités ayant entaché la procédure, avant d’être finalement confirmées en février 2014. Sajad Sanjari s’est vu accorder un nouveau procès en juin 2015, après l’ajout dans le Code pénal islamique de 2013 de nouvelles dispositions relatives à la condamnation de mineurs, qui permettent aux juges de remplacer la peine capitale par une autre sanction s’ils estiment que le mineur concerné n’a pas compris la nature de son acte ou ses conséquences, ou s’il existe des doutes quant à « son développement et sa maturité psychologiques » au moment des faits. En tant qu’État partie à la Convention relative aux droits de l’enfant et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), l’Iran est légalement tenu de traiter toutes les personnes ayant moins de 18 ans comme des mineurs, et de s’assurer qu’elles ne soient jamais condamnées à mort ni à la réclusion à perpétuité Cependant, un tribunal pénal de la province de Kermanshah a une nouvelle fois condamné Sajad Sanjari à la peine de mort le 21 novembre 2015 après avoir conclu, sans justifier sa décision, que l’accusé avait atteint un certain degré de « maturité » au moment des faits. Pour parvenir à cette conclusion, le tribunal n’a pas envoyé Sajad Sanjari devant l’Organisation iranienne de médecine légale, institut médicolégal public, afin d’évaluer sa maturité et a ignoré l’opinion d’un consultant auprès des tribunaux spécialiste en pédopsychologie, qui avait affirmé que Sajad Sanjari manquait de maturité psychologique au moment des faits. Lors de son premier procès en 2012, le tribunal avait conclu qu’il avait atteint un certain degré de « maturité » à 15 ans, sur la base du « développement de ses poils pubiens ». La Cour suprême a par la suite confirmé la sentence et la requête déposée pour un nouveau procès a été rejetée. En janvier 2017, les autorités iraniennes ont suspendu l’exécution programmée de Sajad Sanjari, à la suite du tollé international [1] qu’elle avait suscitée. EXÉCUTIONS IMMINENTES D’AUTRES JEUNES HOMMES ARRÊTÉS ALORS QU’ILS ÉTAIENT MINEURS Deux jeunes hommes, Hossein Shahbazi et Arman Abdolali, arrêtés et condamnés à mort pour des crimes qui se sont déroulés lorsqu’ils avaient 17 ans, risquent d’être exécutés de manière imminente. Leurs procès ont été entachés de graves violations des droits humains – notamment l’utilisation d’« aveux » extorqués sous la torture. L’exécution de Hossein Shahbazi était programmée pour le 25 juillet 2021, mais a été repoussée à la dernière minute du fait du tollé mondial qu’elle a suscitée. Son exécution pourrait être reprogrammée à tout moment. Amnistie internationale a identifié au moins 80 personnes qui se trouvent actuellement sous le coup d’une condamnation à mort en Iran pour des crimes perpétrés avant leurs 18 ans. En 2020, elle a recensé au moins trois exécutions de personnes déclarées coupables de crimes qui se sont déroulés alors qu’elles avaient moins de 18 ans, ce qui fait de l’Iran le seul pays au monde à procéder à de telles exécutions. Depuis janvier 2005, elle a recensé l’exécution d’au moins 95 personnes âgées de moins de 18 ans au moment des crimes dont elles avaient été reconnues coupables. Le nombre réel de prisonniers exécutés et risquant d’être exécutés est probablement plus élevé. Aux termes de la loi iranienne, les garçons âgés de plus de 15 années lunaires et les filles âgées de plus de neuf années lunaires sont présumés coupables au même titre que les adultes en cas d’homicide ou de certains autres crimes passibles de la peine capitale et peuvent par conséquent être condamnés à mort. Or, en tant qu’État partie à la Convention relative aux droits de l’enfant et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), l’Iran est légalement tenu de traiter toutes les personnes ayant moins de 18 ans comme des mineurs, et de s’assurer qu’elles ne soient jamais condamnées à mort ni à la réclusion à perpétuité. Les autorités saoudiennes ont au cours des six derniers mois intensifié la persécution des défenseur·e·s des droits humains et des dissident·e·s et accéléré le rythme des exécutions, après une accalmie observée sur le front des poursuites visant les militant·e·s et une forte diminution du recours à la peine de mort pendant la période de présidence par l’Arabie saoudite du G20 l’an dernier, souligne Amnistie internationale dans un nouveau document rendu public 3 août. Ce document, intitulé Arabie saoudite. Après le G20, la liberté d’expression à nouveau réprimée, montre qu’après que l’Arabie saoudite a cédé la présidence du G20, les autorités ont engagé des poursuites, prononcé des condamnations ou ratifié les condamnations à mort d’au moins 13 personnes, à l’issue de procès d’une flagrante iniquité tenus devant le Tribunal pénal spécial (TPS). Après une chute de 85 % du nombre d’exécutions enregistrées en 2020, au moins 40 personnes ont été mises à mort entre janvier et juillet 2021 – ce nombre étant supérieur a celui relevé pour toute l’année 2020. « Dès que les projecteurs n’ont plus été braqués sur l’Arabie saoudite, les autorités ont recommencé à poursuivre impitoyablement des personnes ayant osé exprimer librement leurs opinions ou critiquer le gouvernement. Dans un cas, le TPS a condamné un travailleur humanitaire à une peine révoltante de 20 ans d’emprisonnement à cause d’un simple tweet dans lequel il avait critiqué la politique économique du pays, a déclaré Lynn Maalouf, directrice adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnistie internationale. « Le bref répit observé concernant la répression, qui a coïncidé avec la tenue du G20 en Arabie saoudite en novembre de l’an dernier, indique que les promesses illusoires de réforme n’étaient qu’un simple exercice de relations publiques. » En février 2021, le prince héritier Mohammed Ben Salman a déclaré que l’Arabie saoudite allait adopter de nouvelles lois et réformer les lois existantes afin de « consolider les principes de justice, garantir la transparence » et « protéger les droits humains ». Il a présenté les grandes lignes des plans visant quatre lois cruciales : la Loi relative au statut personnel, la Loi relative aux transactions civiles, le Code pénal pour les peines discrétionnaires et la Loi relative à la preuve. Les autorités n’ont toujours pas rendu publique quelque information que ce soit au sujet des suites qui auraient été données à ces promesses de réforme. En lieu et place de tout progrès en matière de droits humains, le TPS, la tristement célèbre juridiction antiterroriste saoudienne, a repris ses activités, prononçant des peines d’emprisonnement à l’issue de procès d’une flagrante iniquité. Dans trois cas au moins, des personnes qui avaient déjà purgé de longues peines d’emprisonnement infligées à cause d’activités militantes pacifiques ont été de nouveau arrêtées et de nouveau condamnées dans le cadre de nouvelles affaires, ou ont vu leur peine alourdie. En juin 2021, un jeune homme appartenant à la minorité chiite a été exécuté à la suite de la ratification d’une peine de mort prononcée trois ans plus tôt après un procès d’une flagrante iniquité. Les procès devant le TPS sont intrinsèquement iniques, les accusé·e·s étant soumis à une procédure irrégulière qui viole les dispositions du droit saoudien et du droit international. Dans de nombreux cas, les personnes accusées sont détenues au secret et à l'isolement pendant plusieurs mois d’affilée et privées d’accès à des avocat·e·s. Le tribunal condamne régulièrement des personnes à de lourdes peines d’emprisonnement, voire à la peine de mort, à la suite de condamnations basées sur des « aveux » arrachés au moyen de la torture. En avril 2021, le TPS a condamné le travailleur humanitaire Abdulrahman al Sadhan à 20 ans d’emprisonnement suivis de 20 ans d’interdiction de voyager, parce qu’il avait exprimé sur Twitter un point de vue satirique au sujet de la politique du gouvernement. Les accusations retenues contre lui étaient basées sur des dispositions vagues relatives à la lutte contre le terrorisme, qui pour certaines criminalisent l’expression pacifique d’opinions. Autre exemple concernant le TPS, la militante des droits humains Israa al Ghomgham a été condamnée en février 2021 à huit ans d’emprisonnement et huit ans d’interdiction de voyager en raison d’accusations liées à ses activités militantes pacifiques et à sa participation à des manifestations contre le gouvernement. Mohammad al Rabiah, qui a été arrêté en mai 2018 pour avoir soutenu une campagne en faveur du droit de conduire pour les femmes en Arabie saoudite, a lui aussi été condamné en avril 2021 par le TPS à six ans d’emprisonnement suivis de six ans d’interdiction de voyager. Il a notamment été accusé d’avoir « cherché à saper la cohésion sociale et à affaiblir l’unité nationale » et « créé et publié un livre contenant des opinions suspectes ». Les défenseur·e·s des droits humains qui ont été libérés de prison restent soumis à des décisions judiciaires d’interdiction de voyager et d’interdiction d’utiliser les réseaux sociaux. La libération tant attendue des défenseures des droits humains Loujain al Hathloul, Nassima al Sada et Samar Badawi, en 2021, a été entachée par des conditions restrictives, notamment par une interdiction de voyager pendant cinq ans, et un risque de nouvelle arrestation à tout moment puisque les peines assorties d'un sursis n’ont pas été annulées. Tous les défenseur·e·s des droits humains libérés après des peines d’emprisonnement sont contraints de signer des engagements, qui comprennent souvent l’interdiction de s’exprimer en public, d’avoir des activités de défense des droits humains et d’utiliser les réseaux sociaux. Ces conditions constituent des violations des droits à la liberté d'expression, d’association et de réunion pacifique. Pendant l’année 2020, une chute de 85 % du nombre d'exécutions a été enregistrée en Arabie saoudite. Immédiatement après la fin de la présidence par l’Arabie saoudite du G20, les exécutions ont repris et neuf personnes ont été exécutées en décembre 2020. Au moins 40 personnes ont ensuite été exécutées entre janvier et juillet 2021, contre 27 pendant toute l’année 2020. Dans de nombreux cas, les exécutions ont eu lieu après des condamnations prononcées à l’issue de procès d’une flagrante iniquité entachés par des plaintes concernant des actes de torture infligés pendant la détention provisoire qui ont conduit à des « aveux » forcés, sur lesquelles le parquet s’est systématiquement abstenu d’enquêter. En juin 2021, Mustafa Darwish, un jeune Saoudien appartenant à la minorité chiite, a été exécuté à la suite de sa condamnation par le TPS en 2018 pour des accusations liées au terrorisme, à l’issue d’un procès d’une flagrante iniquité. Lors d’une audience, il a déclaré devant le juge : « On m’a menacé, frappé et torturé pour que je fasse des aveux [...] J’ai avoué parce que je craignais de perdre la vie. » « Les projets de l’Arabie saoudite concernant des réformes limitées de la législation et en matière de droits humains ne signifient rien face à la poursuite des exécutions, des procès iniques et des sanctions implacables dont font l’objet les défenseur·e·s des droits humains, les militant·e·s et les journalistes. Nous demandons au Conseil des droits de l'homme de l’ONU de créer un mécanisme de surveillance et d’informations sur la situation des droits humains en Arabie saoudite, a déclaré Lynn Maalouf. « Si les autorités saoudiennes veulent montrer qu’elles sont réellement déterminées à respecter les droits humains, la première étape devrait alors consister à libérer immédiatement et sans condition tous les défenseur·e·s des droits humains détenus uniquement parce qu’ils ont exercé pacifiquement leurs droits humains, et à annuler leurs condamnations et lever toutes les autres sanctions. » Au moins 39 personnes sont actuellement incarcérées en Arabie saoudite en raison de leurs activités militantes, de leur travail de défense des droits humains ou parce qu’elles ont exprimé des opinions dissidentes, d’après les recherches menées par Amnistie internationale. |
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